Encore un billet qui ne va pas être très gai. Je sais que ça en fait pas mal ces derniers temps mais bon c'est comme ça, ce doit être un effet bizarre du printemps sur moi :-))
En fait c'est le commentaire de ma blogamie Laudith sur la note "Eux et moi, bis" concernant le fait d'être seul ou mal accompagné, et la réponse que je lui ai faite, qui m'ont donné envie de vous parler de ce morceau de ma vie. Parce qu'en effet, j'en connais autant sur la solitude que sur le fait d'être mal accompagnée.
J'avais 23 ans quand j'ai rencontré F. On travaillait dans la même société, une grosse boîte. J'étais hôtesse d'accueil, il travaillait au service entretien et maintenance en tant qu'électricien. Il avait 28 ans, il était marié et avait une petite fille d'un peu plus de 2 ans. On s'est plu, on a rapidement démarré une relation, extraconjugale en ce qui le concernait. Je ne me plaignais de rien, la situation m'allait, je n'ai jamais une seconde envisagé qu'il brise son couple pour moi. Probablement n'étais-je pas méga amoureuse mais bref, tout m'allait très bien comme ça. Au bout de 2 ou 3 mois de cette relation il m'appelle un week-end où j'étais allée voir mes parents, et m'annonce tout de go qu'il vient de décider de quitter sa femme, et arrive me rejoindre chez mes parents pour faire leur connaissance. J'ai fait un bond de 18 mètres au téléphone et lui ai répondu "Non mais ça va pas la tête ??!!" J'ai tout essayé, l'ai supplié de réfléchir, de ne pas faire ça, de penser à sa fille, lui ai dit et répété qu'on était très bien comme ça, que ça me suffisait. Rien à faire. Tout ce que j'ai réussi c'est qu'il ne débarque pas chez mes parents dans l'heure, mais ce n'était finalement qu'un détail. Il a répondu à toutes mes tentatives de dissuasion en disant que ça faisait déjà pas mal de temps que ça n'allait plus avec sa femme, que ce n'était pas arrangeable, que ce n'était pas pour rien s'il avait craqué pour quelqu'un d'autre, etc. Trois jours plus tard il débarquait avec toutes ses affaires dans le grand studio en plein coeur de Paris que j'habitais à l'époque. Et là a commencé l'enfer. Pour 5 années. En fait on se connaissait peu, ce n'est pas en voyant quelqu'un quelques petites heures à peine une fois par semaine pendant 3 mois, en plus essentiellement pour faire l'amour, que l'on peut le connaître. J'ai d'abord découvert quelqu'un de terriblement jaloux. Maladivement jaloux. Le moindre homme qui me regardait dans la rue (et à cette époque toute modestie mise à part c'était plutôt fréquent) et j'avais droit à une scène épouvantable, alors que je n'y étais absolument pour rien et n'avais même rien remarqué. Je trouvais aussi qu'il buvait un peu trop, mais je me disais que ce devait être le stress du divorce (sa femme était quelqu'un d'extraordinaire et ne lui a pourtant pas rendu les choses difficiles bien au contraire) et je ne cherchais pas plus loin. Et puis il était capable d'être si gentil, si généreux, si adorable, que ça effaçait chaque fois le reste. Après 3 mois de vie dans mon studio on a décidé de se choisir quelque chose d'un peu plus grand et on a emménagé tous les deux dans un grand 2 pièces. Mais les crises de jalousies empiraient, et devenaient même problématiques par rapport à mon travail : il passait me voir à mon poste d'accueil sans arrêt, et si j'avais le malheur de sourire à quelqu'un (ce qui était tout de même mon job) hop j'avais une méga scène. Il buvait aussi de plus en plus, il est devenu totalement alcoolique. Il commençait à 7h00 du matin avec de la bière, puis passait au whisky et n'arrêtait pas avant de se coucher. Pourquoi donc ne suis-je pas partie en courant ? J'ai été complètement phagocytée, je culpabilisais à cause de son divorce, je me disais que je ne pouvais plus l'abandonner maintenant, qu'il était malade et avait besoin de moi. Il était aussi dépressif au dernier stade et a fait 3 tentatives de suicide aux médicaments pendant qu'on était ensemble. Heureusement qu'il était inconscient quand les pompiers venaient le chercher parce qu'à force j'étais presque devenue copine avec le jeune et très mignon capitaine de la caserne ;-)
Il était aussi petit à petit devenu violent. Il ne m'a jamais réellement frappée, mais il a essayé de me tuer 2 fois, par strangulation. Sans aucune raison, probablement juste parce que je devais être en train de l'em*erder à le supplier d'arrêter de boire. Et je peux vous assurer que c'est une sensation atroce, ces mains serrées autour du cou, d'une force inouïe, cette impossibilité de respirer, le noir qui envahit tout, la force qui s'en va. Heureusement que je ne suis pas une toute petite nature et que j'ai chaque fois réussi à me défendre, parce que sinon je ne serais probablement pas là aujourd'hui. Ensuite j'en avais pour des jours et des jours à me promener en col roulé ou le cou entouré de foulards pour cacher les marques violettes. Qu'est-ce que j'ai dû m'inventer comme soi-disant angines qui ne guérissaient pas... Il tapait dans les murs, il s'en est même une fois cassé la main, brisait des objets. Pourquoi ai-je accepté tout ça ? Pourquoi ai-je toujours tout pardonné ? Je crois que je ne le saurai jamais. Après chaque scène il revenait avec un bouquet de fleurs plus grand que lui, un cadeau, des excuses qu'il me faisait en pleurant, en promettant de ne jamais recommencer. J'ai réussi à lui faire suivre une cure de désintoxication alcoolique, ce qui n'a pas été facile pour deux raisons : d'abord le fameux déni "mais non je ne suis pas alcoolique, j'arrête quand je veux", ensuite le fait de savoir que j'allais rester toute seule pendant 3 semaines, c'était trop pour sa jalousie. Il a quand même fait cette cure, m'appelant 10 fois par soirée pour savoir si j'étais là. Quand il en est revenu et a vu que j'avais viré tous les alcools de l'appartement, il est ressorti tout racheter et a recommencé à boire.
On avait quand même des bons moments, c'est probablement ce qui m'a fait rester, il savait aussi être très gentil ; mais de plus en plus rarement au fil du temps. Et puis un jour, au bout de 5 ans de cet enfer, lors d'un dîner chez des amis il y a eu un déclic en moi et ça a été fini. Terminé. J'ai enfin réalisé qu'il était en train de me tuer à petit feu, qu'il me prenait toute mon énergie pour essayer de vivre car il n'y arrivait pas tout seul et que je ne pourrai jamais rien faire pour lui, pour l'aider ; son mal-être était un puits sans fond. Je dépérissais, je suis à cette époque descendue à 51 kilos (je vous rappelle que je mesure 1m 75), et pourtant il n'était pas question d'anorexie, juste du fait qu'il me pompait littéralement toute ma substance vitale. Ma soeur de coeur Vivie peut témoigner de cette époque...
Je l'ai donc quitté. ça n'a pas été facile à gérer parce qu'il s'était mis en tête que je faisais juste une crise et que j'allais revenir vers lui, il me harcelait au travail (je vous rappelle qu'on bossait dans la même boîte) et au téléphone, heureusement il était plus souvent en arrêt de travail pour dépression que présent ce qui me permettait de travailler à peu près normalement. J'ai déménagé et me suis mise sur liste rouge. Il s'était lui aussi trouvé un autre appart, enfin il vivait chez une copine. Elle était toxico, alors bien sûr il a rapidement ajouté la drogue à l'alcoolisme, il n'était plus à ça près. 8 mois après notre séparation il s'est tué en se jetant d'une fenêtre du 4ème étage de là où il habitait. J'étais en vacances avec mon nouveau petit ami (celui avec qui j'ai fait le voyage dans le Sahara) dans le sud de la France. C'est ma Vivie (on travaillait ensemble aussi) qui a appelé mes parents pour leur annoncer la nouvelle et ma mère m'a appelée dans le sud. J'avoue, j'ai affreusement culpabilisé sur le moment. Mais heureusement j'étais entourée de gens adorables, mon ami, ses parents et sa soeur, qui m'ont aidée à passer ce cap.
Alors voilà, tout ça pour dire qu'en effet mieux vaut être seul(e) que mal accompagné(e). Cette note est très longue, ce n'est pas trop mon habitude et en général j'évite, mais je pouvais difficilement faire plus court cette fois-ci. J'espère quand même que je ne vous ai pas trop ennuyés, et je vous promets que le prochain billet sera beaucoup plus gai que les derniers ! ;-)
Bravo à ceux qui ont eu le courage d'aller au bout de cette tartine, et gros bisous et bon week-end de 1er mai à tout le monde :)
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